Congo : Après 10 ans,  les sinistrés de Mpila, toujours sans abri

Dévasté le 4 mars 2012 après avoir été soufflé par la déflagration dans un dépôt d’armes et de munitions, le quartier de Mpila, à Brazzaville, attend sa reconstruction.

Le 4 mars 2012, de gigantesques explosions dans un dépôt d’armes et de munitions d’une caserne militaire dévastaient le quartier de Mpila, à Brazzaville, au Congo. Dix ans après, la plupart des quelque 17 000 sinistrés recherchent toujours un logement descent. Les habitants de Mpila vivent jusqu’à présent dans des abris de fortune. Toute chose qu’ils déplorent. Paul Lando, cité par le journal Le Monde, raconte comment sa maison de 7 pièces a été soufflée par déflagration. Père d’une famille nombreuse, Paul Lando, la soixantaine, a érigé un hangar, fait essentiellement de tôles, tout près de la maison envahie de mauvaises herbes. « Mon hangar suinte de partout quand il pleut. Quand il y a un grand soleil, la chaleur est insupportable. C’est dans ces conditions que je vis depuis dix ans, dans l’indifférence totale des autorités », s’est-il désolé auprès de l’AFP. « Quand vous voyez nos maisons, c’est comme si un tsunami était passé par là, il y a quelques jours, alors qu’elles sont dans cet état depuis une décennie », déplore lui aussi Anaclet Mouango, 50 ans, assureur de formation. « C’est un désastre. Les gens continuent de vivre dans la précarité, à la belle étoile », affirme pour sa part Raymond Mpassi, un autre sinistré.

Un abandon de l’Etat?

Selon Le Monde, le coût de la reconstruction du quartier est officiellement estimé à 233 milliards de francs CFA (quelque 355 millions d’euros). En 2021, l’Etat a payé un acompte d’un milliard de francs CFA à un millier de sinistrés et compte verser un autre acompte de 6 milliards en 2022, selon notre source. Une somme dérisoire par rapport au total des coûts de la reconstruction du quartier. Défenseur des droits de l’homme, Trésor Nzila pense que l’État a trop traîné pour reloger dignement les sinistrés de Mpila : « Dix ans après, le gouvernement congolais est incapable de trouver une réponse durable et satisfaisante à la situation du 4 mars. Nous comprenons que les priorités sont ailleurs », a-t-il dénoncé, selon rfi.

Après les explosions, l’Etat a proposé aux sinistrés sans abri de s’installer provisoirement sur un site de 1 000 logements construits à Kintélé, à 25 km au nord de Brazzaville, en attendant des solutions définitives. Mais ceux qui y habitent se plaignent de leurs conditions de vie, de l’éloignement du centre de la capitale où les gens vont travailler et s’approvisionner.

Paradoxalement, sur le site de l’explosion, a été érigé un bâtiment flambant neuf, la mairie du sixième arrondissement de Brazzaville. Aux alentours, des logements sociaux sont également sortis de terre mais restent inoccupés, pour une raison inexpliquée. L’Etat a également construit de nouvelles casernes, cette fois à la périphérie de la ville.

En rappel, les explosions du 4 mars 2012 ont fait au moins 282 morts, plus de 2 300 blessés dont 114 invalides, plus de 25 000 déplacés dont 17 000 sans-abri. Au moins 22 000 élèves avaient dû changer d’école à la suite de la destruction de leurs établissements. En 2013, six militaires ont été condamnés pour « incendie volontaire et atteinte à la sûreté de l’État ».Line Rose