Sassouma Bérété, femme légende à l’origine de l’empire du Mali

Celle que certains appelaient Tassouma, d’autres Fatoumata Bérété, fut la première épouse du roi Maghan Kon Fatta du Manding, connu sous le nom de Naré Fah Maghan Konaté (Kéita en fait). Il s’agit de Sassouma Bérété, la mère du roi Dankaran Toumani. Elle reste la femme légende à l’origine de l’empire du Mali, selon des sources historiques, l’épopée mandingue et des sources écrites.

Sassouma Bérété et Sogolon Djata furent les deux pôles de la féminité dans l’épopée la plus célèbre du roi Soundiata Kéita, contée par l’écrivain Djibril Tamsir Niane. Les deux sont, en effet, des coépouses, deux des trois épouses du roi Naré Fah Maghan Konaté. Sassouma, première épouse du roi, est décrite par le récit patriarcal de l’épopée comme une femme négative, parce que forte, agressive, extravertie, ambitieuse et avide de pouvoir. Du fait de son rang de première épouse du roi, c’est son fils Dankaran Touman que le conseil des sages désigna pour succéder à son père au trône en 1218, à la mort de celui-ci, quand bien même une prophétie ou un procédé divinatoire avait indiqué que l’héritier du trône naîtra d’une autre femme que le roi épouserait, en l’occurrence Sogolon kédjou. Le roi va marier cette dernière qui donnera naissance à l’estropié Soundjata Kéita, futur roi du Manding. L’épopée retient que Sassouma Bérété, ayant entendu ces prédictions, va s’employer à marginaliser Sogolon et son fils qui subira toutes les brimades ou méchancetés possibles, dans le but de les écarter du trône. Elle brise tous les stéréotypes de genre pour incarner dans la réalité l’authentique héroîne perçue comme une féministe de son époque. Mais ce féminisme reste pour une catégorie d’hommes et de femmes un féminisme de façade, du fait que Sassouma, au lieu d’être solidaire de Sogolon Djata, sa coépouse, forçait la rivalité avec cette dernière pour son seul intérêt. Face à l’ambitieux roi du Sosso, Soumaoro Kanté, qui cherche à agrandir son royaume au détriment du royaume Manding dirigé par Dankaran Touma Kéita. Pour détourner le redoutable et invulnérable roi du Sosso du Manding, une conciliation est engagée avec ce dernier sous l’instigation de Sassouma Bérété, sans succès.

La stratégie salvatrice de Sassouma Bérété

Celle-ci propose alors qu’on donne sa fille Nana Triban en mariage au roi Soumaoro Kanté, avec pour mission de percer le secret de ses mystères et de les communiquer au roi du Manding. Mais Soumaoro, le roi féroce, envahit par la suite le Manding, massacre les populations et détruit les habitations. Soundiata, jusque-là malingre et perclus, arrive miraculeusement à se redresser sur ses pieds. Il a l’âge de se battre, il prépare et engage la guerre contre Soumaoro Kanté. La guerre fait rage, Soumaoro est protégé par ses fétiches et ses pouvoirs mystiques. C’est finalement Nana Triban, la fille de Sassouma Bérété, qui sauve le Manding en rapportant à son frère Soundiata le secret de l’invulnérabilité de Soumaoro : “Une flèche de bois, armée d’un ergot de coq blanc, peut rendre mortel le roi des forgerons”, confia-t-elle son frère. C’est grâce à ce secret que le camp Soundiata Kéita vainquit Soumaoro Kanté et ses troupes à la bataille de Kirina en 1235 avant de fonder, puis agrandir l’empire du Mali. En définitive, Sassouma Bérété dont l’adversité indescriptible a forgé le caractère du fondateur de l’empire du Mali (Soundiata Kéita), aura donc été la femme légende à l’origine de l’empire du Mali, de par son génie de femme stratège. Pour cela, elle mérite de figurer au panthéon des héroïnes afro-féministes de l’histoire.

Lonsani SANOGO