
La société civile burkinabè est indissociable à la gestion du pouvoir public. Au Burkina Faso, nous avons assisté à une pléthore d’organisations de la société civile sous Roch Marc KABORE. Malgré la multiplicité des organisations de la société civile, cela n’a pas empêché le coup d’Etat qui a conduit Henri Sandaogo Damiba au pouvoir. Après quelques mois de gestion, il est aussi éjecté par le jeune capitaine Ibrahim Traoré à qui la population a placé sa confiance grâce à sa vision pour le Burkina Faso. Même si les nouvelles autorités ont suspendu les activités civiles et politiques, une Coordination d’organisations de la société civile constitue un bouclier du régime actuel. Jour et nuit, ils sont prêts à tout. Cependant l’on se demande comment ces organisations arrivent-elles à avoir du financement dans le cadre de leurs activités? Pourquoi soutiennent-ils le régime du capitaine Ibrahim Traoré? Ces questions nous ont poussé à rencontrer Hamadi Maïga, président du Collectif des leaders panafricains. Pas très connu du grand public, discret, il est pourtant l’un des grands financiers de ces organisations de la société civile, au microphone du Quotidien Numérique d’Afrique, tout en faisant une analyse de la situation nationale, il nous dit les raisons qui l’ont poussé à s’engager.
QNA: Quelle analyse faîtes vous de la situation sécuritaire au Burkina Faso ?
MH: La situation sécuritaire est toujours préoccupante mais pour arriver au bout du terrorisme, il faut que les populations s’invitent davantage dans la lutte contre ce mal et s’approprient des valeurs d’auto-défense développer dans le cadre du recrutement des Volontaires pour la défense de la Patrie ( VDP ) par l’Armée. Cela peut renforcer la coopération civilo-militaire dans les zones à fort défi sécuritaire car le renseignement étant primordial dans cette guerre asymétrique. Il faut que les populations s’engagent en toute sincérité pour permettre au service de renseignement de prendre le dessus sur les groupes armés terroristes qui projettent d’attaquer leur village. Il nous revient souvent que de nombreuses personnes refusent de donner des informations à l’Armée par peur de représailles des terroristes. Pourtant dans cette situation de terrorisme prétendre être neutre dans une zone d’insécurité n’est pas une option qui peut te permettre d’avoir la vie sauve lors d’une attaque. Les terroristes en commettant leur sale besogne ne font aucune distinction. Il y a aussi l’aspect contrôle de l’information sur le champ de guerre. À mon humble avis, je préférais que certains de nos compatriotes s’abstiennent de divulguer des informations sur nos pertes au risque de devenir des relais de communication des groupes terroristes. Ils ( les terroristes, ndlr) doivent être informés de nos victoires et pas de nos défaites.
QNA: Pourquoi avez-vous décidé de soutenir cette transition ?
MH: Notre décision de soutenir cette Transition vient du caractère véridique que le Capitaine Ibrahim Traoré a eu à nous édifier sur certaines décisions des gouvernements précédents qui mettaient en mal notre souveraineté nationale. Sinon, le Collectif des leaders panafricains existait depuis le temps de l’ancien président Roch Marc Christian Kabore et du Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba mais au regard des valeurs que véhiculent ces deux régimes nous avons préféré de ne pas trop nous afficher.
QNA: Quelles sont les raisons qui poussent votre structure à opter pour un changement de Constitution ?
MH: Le constat que nous faisons de cette Constitution actuelle est qu’elle n’est pas conforme avec les realites sociales et ne permet pas aux dirigeants d’avoir le pouvoir de décision puisqu’elle est une copie de la Constitution française. En plus, elle ouvre la voie d’entrée à plusieurs vices comme l’homosexualité ce qui est contraire à nos valeurs morales.
QNA: Nous avons remarqué que les leaders de la société civile organisent fréquemment des activités, quelles sont vos sources de financement ?
Nous nous sommes attendus. Parmi nous, d’autres ont de grandes entreprises, d’autres aussi sont des entrepreneurs, des opérateurs économiques, d’autres ont des usines, d’autres des voitures. Je connais quelqu’un qui a octroyé des voitures pour le bon fonctionnement des meetings. Au cas où nous voudrions organiser un meeting, chacun prend l’engagement de prendre une partie des dépenses. Moi même je suis dans ce cas. Le jour où le président a pris le pouvoir c’est moi j’ai assuré la location du podium à la Place de la Nation durant tous les jours de manifestation. Après, d’autres personnes ont apporté leurs contributions. Nous ne recevons aucun financement de la part des autorités. Ensemble nous arrivons à subvenir à nos charges. Pour la vérité, nous sommes prêts à tout. Nous suivons la vérité. Concernant le récent meeting qui s’est déroulé à la Place de la Nation le 1er juillet 2023, le Collectif des leaders panafricains a pris en charge 50 cars, des tentes, et d’autres choses. Les autres organisations ont pris aussi en charge d’autres dépenses. En bref, chacun donne sa contribution. Chacun travaille dans sa société mais si nous voulons organiser un grand meeting, nous unissons les fonds pour pouvoir prendre en charge les dépenses. Concernant le meeting qui s’est déroulé le 1er juillet, nous avons entendu que la CEDEAO avait une rencontre le 9 juillet. Nous nous sommes dits que si on sancionne le Burkina lors de cette rencontre, cela ne va pas arranger le pays donc nous avons fait le meeting pour anticiper les choses, nous avons également évoqué le projet de la nouvelle Constitution et réitéré notre soutien au président de la Transition dans sa vision de lutte contre le terrorisme.
QNA: Ne pensez-vous pas en avoir fait assez comme soutien pour la Transition. Est ce que les gens ne seront pas lassés de vos activités ? Si nous remarquons que la moindre rumeur est synonyme d’une manifestation ?
Les armes seules ne peuvent pas éradiquer le terrorisme. Ce sont les gens de la ville qui encouragent les terroristes dans les villages. Notre meeting était adressé à la rencontre des chefs d’États qui était prévue lundi 9 juillet 2023 en Guinée Bissau. Si on nous sanctionne, le terrorisme aura de l’ampleur. C’était la raison de notre réunion pour mettre en garde la CEDEAO, pour qu’elle n’interfère pas dans les affaires internes du Burkina et leur dire que c’est nous qui donnons la légitimité à la Transition. Nous voyons que les gens qui parlent de notre meeting ne veulent pas le bien du Burkina Faso. Si ce n’est pas à travers les meetings qu’on peut faire passer un message, est-ce que tu peux aller de porte-en-porte pour faire passer un message. Donc, il faut mobiliser les gens et faire passer le message. Selon nous, les gens ne seront pas lassés de sortir parce que quand nous organisons un meeting parce qu’il y a un problème. Nous ne faisons pas les meetings au hasard. Pour le meeting passé, presque tout le monde est favorable au changement de Constitution. Il faut adapter la Constitution à nos réalités. Cela est aussi notre effort de paix. Tout le monde ne peut pas faire. La guerre se fait à deux niveaux, en ville et dans les villages. Parmi nous des gens ont contribué aussi à l’effort de paix lancé par le gouvernement. Lors de nos rencontres, des gens profitent pour venir faire des dons à cet effort.
QNA: Un des leaders de la société civile a déclaré qu’il est entrepreneur politique, est-ce que vous vous inscrivez dans cette dynamique, c’est-à-dire s’accrocher à l’État pour vivre?
Pour soutenir un régime, il faut d’abord avoir des fonds. Savoir ce que tu veux. Moi je ne sais pas écrire, c’est quel poste je peux obtenir en guise de soutien à la Transition. Je ne peux pas avoir de poste. Nous soutenons la Transition parce que le Burkina est dans un véritable dilemme et il faut que chacun fasse sa contribution. Parmi les leaders de la société civile, il n’y a pas cette personne qui n’a pas une fonction précise. Il faut que les gens sachent qu’on ne peut pas soutenir un régime sans avoir de fonds. Aucun leader de la société civile actuelle n’a été ministre, ni député. C’est la raison pour laquelle notre soutien est toujours solide. Je prie Dieu pour que personne ne gagne un poste. Sous Rock nous avons voulu un agrément pour pouvoir ouvrir une usine, nous avons rencontré des grandes personnalités mais on nous a fait savoir qu’on ne peut pas remettre l’agrément gratuitement malgré la gratuité du papier. Pourtant des gens sont venus d’Europe et 6 mois plus tard, ces derniers ont reçu leurs agréments. Comme si nous ne sommes pas des Burkinabè. Tout cela parce qu’ils veulent être corrompus. Je parle parce que tout cela à conduit à mon militantisme dans la société civile. Nous avons été trop brimés. Parmi les leaders chacun a eu un problème spécifique d’où notre soutien à la Transition. Donc personne ne veut un poste. C’est la vérité que nous voulons.
QNA: Que pensez-vous des attitudes de ces personnes : Alain Alain, Lookman SAWADOGO, Marcel Tankaono, Désire Guinko, etc.?
Si le plan de ces derniers avait réussi. C’était automatiquement une guerre civile. Le journaliste Alain Alain a tout dit sur nous, il nous a insulté. Si on ne recadre pas ces personnes, ils vont pervertir la jeunesse. Il faut mettre en place la loi de Talion , œil pour œil, dent pour dent.
QNA: Qu’est ce vous pensez du projet d’union entre le Burkina Faso et le Mali ? Ce projet ne serait-il pas un mort-né après les Transitions ?
L’Union fait la force. Le Mali et le Burkina Faso ont les mêmes problèmes d’où l’importance de l’union. S’ils arrivent à avoir la bonne solution même après eux, les présidents qui vont venir sont obligés de continuer la fédération. Nous demandons au président Ibrahim TRAORÉ de bien travailler pour que la fédération aille au-delà du Mali. Pour que le projet englobe d’autres pays africains. Pour qu’ ensemble nous ayons la même monnaie. Prenons l’exemple de Kadhafi, les Blancs ont manipulé la population. C’est grâce à la population que l’OTAN a pu vaincre Kadhafi. Nous appelons l’ensemble de la population à soutenir la Transition dans sa dynamique de gouvernance. Actuellement, les politiciens s’agitent pour les élections, il faut que la population se mobilise. Nous ne pouvons pas aller en si peu de temps aux élections. Ce sont les mauvais politiciens qui nous ont mis dans ce problème.
QNA: Certains reprochent à vos partisans d’être des extrémistes, que pensez-vous de cela et quel est votre message à l’endroit de ces personnes?
MH: À ce niveau, le Collectif des leaders panafricains est ferme envers ces personnes. Cela a été le cas avec le Sieur OUERMI Issa que nous avons exclu de notre OSC à cause de ses discours à tendance ethnique qui pouvaient mettre en mal notre vivre-ensemble déjà en difficulté. Le Collectif a toujours appelé ses leaders à se départir des discours emprunts d’insultes et d’exclusion car cela n’arrange ni les autorités de la Transition ni eux même qui peuvent être l’objet de poursuites judiciaires. À l’endroit de toutes les personnes qui ont été vexées dans le passé par certains propos de nos membres, je leur demande humblement pardon parce qu’à l’heure où nous en sommes, toutes nos énergies doivent être mobilisées pour aller à l’union autour de la Transition afin de mettre fin au terrorisme.
Interview réalisée par Mohamed OUEDRAOGO et Lucien DAKISSAGA