Freetown abolie la peine de mort

Les organisations des droits de l’Homme saluent l’abolition de la peine de mort en Sierra Leone

Après le Malawi et le Tchad, c’est la Sierra Leone qui a aboli la peine de mort. Le  vendredi 23 juillet 2021, les parlementaires sierra leonais ont voté à l’unanimité  pour abolir la peine de mort, après un débat intense, a rapporté RFI. Une avancée saluée par les organisations des droits de l’homme et de la société civile, qui estiment toutefois que ce n’est qu’une première étape.

La Commission vérité et réconciliation d’après-guerre avait recommandé l’abolition de la peine de mort en Sierra Leone. C’était un engagement des autorités avant le dernier scrutin. C’est désormais chose faite. La peine capitale sera désormais remplacée par une peine d’emprisonnement à perpétuité ou à un minimum de 30 ans, a indiqué RFI.

En réaction au vote sur l’abolition de la peine de mort en Sierra Leone, Samira Daoud, directrice pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale à Amnesty International, a déclaré : « le vote du Parlement en faveur de l’abolition de la peine de mort en Sierra Leone est une grande victoire pour toutes les personnes qui ont fait campagne sans relâche pour reléguer ce châtiment cruel dans les livres d’histoire et renforcer la protection du droit à la vie”.

Ibrahim Tommy, directeur exécutif du Centre pour la redevabilité et l’état de droit, cité par notre source, se réjouit de cette avancée. « Nous rejoignons un certain nombre de pays à travers le monde qui considèrent que la peine de mort est barbare, que c’est mal de donner le droit à l’État d’exercer la violence contre ses propres citoyens. C’est donc un développement bienvenu et je pense que c’est une victoire massive pour la protection des droits de l’homme en Sierra Leone », a-t-il réagi.

Historique de la peine de mort en Sierra Leone

Pour des détracteurs du président, cette abolition est un moyen pour l’actuel Chef de l’Etat de se soustraire de la justice et d’échapper à la peine capitale

Depuis l’accession à l’indépendance en 1961, les gouvernements Sierra-Leonais ont toujours utilisé la peine de mort pour marquer des points politiques et éradiquer leurs opposants. Surtout dans les années 1970, sous le régime brutal du communiste Siaka Probyn Stevens, a expliqué The Sierra Leone Telegraph. En 1992, un groupe de soldats, le NPRC, qui était dirigé par le président actuel, Julius Maada Bio et le capitaine Valentine Strasser,  ont exécuté des dizaines de personnes, après avoir organisé un coup d’État et conservé le pouvoir pendant près de quatre ans, avant la tenue des élections, a ajouté notre source. Plusieurs personnes tiennent les dirigeants du NPRC, dont le président Bio, comme responsables du meurtre extrajudiciaire de leurs proches. Et pour ses détracteurs, cette abolition est un moyen pour l’actuel Chef de l’Etat de se soustraire de la justice et d’echapper de la peine capitale.

En 1998, un moratoire de facto sur l’application de la peine de mort a été mis en place, après que l’ancien président Kabbah ait exécuté 24 soldats, pour leur implication présumée dans une tentative de coup d’État, selon notre source.

Le dernier rapport d’Amnesty International sur le recours à la peine de mort dans le monde montre que les condamnations à mort recensées ont augmenté en Sierra Leone en 2020 par rapport à 2019, passant de 21 à 39. Toutefois, aucune exécution n’a eu lieu en 2020 ; le président a commué sept condamnations à mort et 94 personnes se trouvaient sous le coup d’une sentence capitale fin 2020. Au 30 juin 2021, 22 pays africains avaient aboli la peine capitale pour tous les crimes.

Pierre Oued.