Burkina Faso / Gouvernance démocratique : Le président Roch Kaboré s’en tire avec la note de 4,72/10

Le présimetre de juin 2019 , un sondage de l’opinion

66% de la population burkinabè n’est pas satisfaite de l’action du président du Faso depuis son accession au pouvoir. 4,72/10, c’est la note que lui attribue le centre pour la gouvernance démocratique au terme d’un sondage réalisé au premier semestre de l’année 2019. L’insécurité, la mise en œuvre de la remise à plat des rémunérations des agents publics de l’Etat, la persistance de la corruption, le chômage, la dégradation des conditions de vie des travailleurs sont autant d’éléments qui pourraient justifier cette note. Le fait majeur de ce sondage est que le niveau de confiance en milieu rural est inférieur à celui en milieu urbain, ce qui est une première.
Le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD) a présenté les résultats du premier sondage d’opinion de l’année 2019 sur la gestion de l’an IV du Président Roch Marc Christian Kaboré. C’était le vendredi 14 juin 2019 à Ouagadougou. C’est un sondage d’opinion réalisé du 1er au 10 juin 2019 auprès de 3024 citoyens de 18 ans et plus sur toute l’étendue du territoire national. De ce sondage, il ressort que plus de la moitié des sondés n’est satisfaite de la gestion du Président Kaboré. La note de 4,72/10 étaye bien leur ressentiment. Le premier facteur explicatif de cette note reste l’insécurité. Selon l’ingénieur statisticien économiste, Nana Issoufou, la sécurité est l’un des facteurs d’insatisfaction totale des citoyens avec tout son corolaire d’exode rural, de crise humanitaire généralisée. « Avec cette insécurité, les citoyens n’arrivent pas à mener leurs activités. Cela a un impact sur toute l’activité économique que ce soit au niveau agricole ou élevage », a déclaré Issoufou Nana.
Un contexte sécuritaire beaucoup plus ressenti en milieu rural
Le fait majeur de ce sondage est que la note moyenne en milieu rural est inférieure à la note moyenne en milieu urbain, soit 4,67 contre 4,84 en milieu urbain. « C’est le contexte général du pays qui explique cette note notamment avec l’insécurité. Evidemment depuis 2017 que nous faisons ces sondages, c’est la première fois que nous avons une note moyenne en milieu rural inférieure à la note moyenne en milieu urbain. Mais, tout le contexte sécuritaire qui est beaucoup plus ressenti en milieu rural pourrait expliquer cette note », a fait remarquer Issoufou Nana. Cependant, l’insécurité n’est pas le seul motif d’insatisfaction en milieu rural. A entendre l’ingénieur statisticien, la grogne sociale touche également le milieu rural. « Que ce soit au niveau de la santé ou de l’éducation avec le développement de la technologie, le milieu rural contrairement à ce qu’on pourrait penser est aussi bien informé de la gestion du gouvernement autour de tout ce qui se passe », a indiqué l’ingénieur statisticien. Les autres éléments d’insatisfaction sont entre autre l’insatisfaction des écoles sous paillotes dans certaines localités, la fermeture des écoles et/ou la perturbation de la scolarité liée à l’insécurité, l’absence de lotissement et l’accaparement des terres par les sociétés immobilières, les grèves dans le système sanitaire et éducatif, le manque d’eau potable dans certaines localités, la difficile mise en œuvre de la politique des 40 000 logements.
Les populations n’ont plus confiance
La crise de confiance a bien aussi été notée par les sondés. Au niveau de la justice par exemple, les citoyens n’ont pas confiance, seulement 30%. Le conseil supérieur de la magistrature qui devrait contribuer à renforcer cette confiance ne s’est pas fait ressentir. Le gouvernement, qui est censé être l’organe de mise en œuvre du programme du président, n’inspire pas confiance aux citoyens. Au niveau du parlement, c’est le même constat. Même par rapport à la CENI, les citoyens ont de moins en moins confiance. « En effet, on est passé de 52% de niveau de confiance en la CENI en 2017 à seulement 42% aujourd’hui. Il en est de même que les partis politique. Les citoyens n’ont pas confiance en leurs partis politiques. 73% des citoyens n’ont pas confiance aux partis politiques, que ce soit de l’opposition ou de la majorité », a indiqué Issoufou Nana. Autant d’éléments qui, selon l’ingénieur statisticien Issoufou Nana, pourraient bien expliquer cette note de 4,72/10 attribuée au Président. Cependant, il a tout de même précisé qu’il s’agit d’un sondage d’opinion dans le cadre du suivi citoyen. « Ce n’est pas un sondage électorale », a-t-il insisté. « Il s’agit de demander aux citoyens de se prononcer et d’apprécier la mise en œuvre des actions du gouvernement. L’objectif ici, ce n’est pas de dire qu’il faut gouverner par le sondage, mais c’est d’utiliser ces résultats comme un feedback social, la réactivité des citoyens face à la mise en œuvre des programmes inscrits dans le projet de société du Président. Et nous pensons que ce feedback social devrait permettre d’améliorer la gouvernance », a-t-il lancé.
Les points de satisfaction
Il n’y a pas que de l’insatisfaction dans ce sondage du CGD. Certaines actions du gouvernement sont bien appréciées. Certes, le contexte sécuritaire a impacté sur l’opinion des citoyens, mais tout n’est pas aussi sombre comme on le pense, a lancé Issoufou Nana. Les citoyens ont noté avec beaucoup d’intérêt les réalisations d’infrastructures que ce soit en milieu scolaire ou sanitaire. La mesure de gratuité des soins est toujours bien appréciée par les populations, même si des difficultés existent toujours dans mise en œuvre. Il en de même pour l’adduction d’eau potable. Il y’a aussi des initiatives dans le domaine de la lutte contre la menace terroriste. A ce niveau, l’opération Otanpouanou a été beaucoup citée par les populations. La promotion des produits locaux avec le port du Faso danfani par le chef de l’Etat sont aussi des motifs de satisfaction. A cela s’ajoutent des infrastructures routières qui sont construites çà et là. « Mais cela ne veut pas dire que c’est suffisant. Il y’a par endroit des infrastructures qui manquent et les citoyens le note. Et même là où il y’a des infrastructures, les citoyens disent que les besoins sont loin d’être satisfaits », a fait remarquer l’ingénieur statisticien.
Le retour de l’ancien chef de l’Etat, Blaise Compaoré n’a pas échappé à la critique des citoyens. 67% disent être favorables pour son retour au pays. Pour le CDG, les résultats de ce sondage doivent servir d’indicateurs aux gouvernants sur les ressentis des populations sur le terrain. Il invite donc le gouvernement à tenir compte de ces sondages pour mieux gouverner.

Sié Alfred