Dossier Sankara: Blaise Compaoré sera-t-il jugé par contumace?

Selon des sources judiciaires, l’ex président burkinabè Blaise Compaoré, chassé du pouvoir en octobre 2014 par la rue, a été mis en accusation le mardi 13 avril 2021 pour «attentat à la sureté de l’État, complicité d’assassinat et recel de cadavres» dans le dossier de l’assassinat de son prédécesseur Thomas Sankara en octobre 1987.

Depuis son exil en terre d’Eburnie , l’ex président burkinabè fait l’objet d’une poursuite judiciaire par la justice militaire de son pays dans l’assassinat non encore élucidé de son prédécesseur et compagnon d’arme, le Capitaine Thomas Sankara le 15 octobre 1987. En effet, le président du Conseil National de la Révolution (CNR), le Capitaine Sankara et 12 de ses collaborateurs seront froidement assassinés dans l’enceinte du Conseil de l’entente, quartier général du pouvoir révolutionnaire. Blaise Compaoré, alors numéro 2 du régime révolutionnaire, prendra le pouvoir à l’issue de ce putsch mené par les militaires. En 1997, pour éviter une quelconque prescription judiciaire, la veuve de Sankara avec l’appui de ses conseils, dépose une plainte contre X pour «assassinat» de son mari.

De 1987 à 2014 durant tous les 27 ans de règne de Compaoré, le dossier Sankara s’apparentait en un sujet tabou et n’avait jamais connu d’avancées majeures. Mais avec l’insurrection populaire de 2014 et le démantèlement du régiment de sécurité présidentielle,garde rapprochée de Compaoré, consécutif au putsch manqué de 2015, les langues se délient peu à peu.

MARATHON JUDICIAIRE

Juridiquement, la plainte de 1997 “a pu sauver l’existence du dossier Sankara” qui courait un risque de prescription. Les autorités de la transition de 2015 avaient fait du dénouement judiciaire des dossiers emblématiques dont celui du leader de la révolution burkinabè, leur cheval de bataille. C’est ce qui explique l’exhumation des restes de Sankara et de ses compagnons afin de «déterminer leurs identités et de lever le voile sur les circonstances de leur mort». Par ailleurs, avec l’arrivée des autorités démocratiquement élues en fin 2015, le dossier connaîtra une autre envergure en termes d’avancée. C’est ainsi que le 7 mars 2016 un mandat d’arrêt fut émis à l’encontre de Compaoré mais jusque-là sans suite favorable.

AUTRES PERSONNES POURSUIVIES

Outre Blaise Compaoré, treize autres personnes sont poursuivies dans cette affaire dont l’ancien bras droit de Compaoré en la personne de Gilbert Diendéré, déjà détenu dans l’affaire du putsch manqué, Hyacinthe Kafando le présumé chef du commando ayant procédé à cet assassinat et bien d’autres personnes. Il est à signaler que certaines personnes poursuivies sont de nos jours décédées . La date de ce procès n’a pas été communiquée mais tout semble faire croire que Blaise Compaoré sera jugé par contumace puisque vivant en exil en Côte d’ivoire et rien ne présage son éventuelle extradition.

Lors d’un point de presse tenu la semaine dernière Abdoul Karim Sango du Parti de la Renaissance Nationale (PAREN) avait souhaité la tenue d’un «procès qui n’humiliera pas Blaise Compaoré» et que celui-ci comparaisse pour que «tous aient la conscience tranquille». Blaise Compaoré répondra t-il présent à ce rendez-vous de l’histoire? Sera t-il jugé par contumace? Les jours suivants nous situeront davantage.

TAPSOBA ABDOUL KARIM