
Le phénomène de harcèlement des femmes prend de plus en plus de l’ampleur, en Egypte, un pays islamisé. Al-Azhar, prestigieuse institution de l’islam sunnite basée en Egypte, a exprimé sa condamnation de toutes les formes de harcèlement sexuel, un fléau qu’elle qualifie de péché. Le haut lieu de l’islam sunnite basé au Caire, a ainsi appelé, le mercredi 28 août 2018, à criminaliser le harcèlement des femmes égyptiennes.
Dans un communiqué publié lundi 27 août 2018, Al-Azhar, a dénoncé des actes interdits et comportements déviants et affirme que l’habit ou le comportement des femmes ne doit en aucun cas justifier un tel acte, qui constitue une atteinte à la dignité et à la liberté des femmes. Selon une étude de l’ONU publiée en 2017, 60 % des femmes ont été victimes de harcèlement en Egypte, où elles sont quotidiennement confrontées à des remarques obscènes voire à des attouchements. Les trois quarts des hommes attribuent ces actes à la tenue vestimentaire des femmes, selon cette étude. En juin 2014, une loi criminalisant le harcèlement sexuel a été adoptée. La question du harcèlement a fait irruption dans le débat public égyptien dans la foulée de la révolte, vers janvier 2011, ayant conduit à la chute du président Hosni Moubarak. De ce fait, la grande mosquée d’al-Azhar, une des plus hautes autorités morales de l’islam sunnite, a condamné le harcèlement sexuel et ceux qui le justifient en mai 2018. Cette déclaration affiche la volonté du cheikh Ahmed Al Tayeb d’assouplir la politique de l’institution. Dans son communiqué relayé par les réseaux sociaux, l’université dénonce des actes interdits et des comportements déviationnistes tout en précisant que l’habit ou le comportement de la femme ne doit en aucun cas justifier un tel acte et constitue une atteinte à sa dignité. L’institution a aussi appelé les autorités du pays à agir. La Croix privilégie le débat serein et approfondi, entre chrétiens et avec ceux qui ne croient pas ou croient autrement. Depuis, la révolte en janvier 2011 ayant conduit à la chute de l’ex président égyptien Hosni Moubarak, la question du harcèlement est très présente dans les esprits des Égyptiens. Selon l’étude de l’ONU publiée en 2017, quelque 60 % des femmes ont été victimes de harcèlement en Égypte, où elles sont quotidiennement confrontées aux remarques obscènes voire aux attouchements. Aussi, les trois quarts des hommes attribuent-ils ces actes à la tenue vestimentaire de la femme. Ainsi, ce n’est pas la première fois qu’Al-Azhar se positionne sur le sujet mais cette fois-ci la condamnation est explicite, explique Baudoin Dupret, directeur de recherche au CNRS avant de reprendre qu’avant, Al-Azhar estimait que la femme avait une part de responsabilité. À travers cette déclaration, l’institution millénaire, souvent réputée conservatrice, Al-Azhar, souhaite se doter d’un visage plus moderniste. Cela signifie aussi qu’Al-Azhar entend jouer un rôle social en Égypte. Cependant, les positions officielles d’Al-Azhar ne représentent pas celles de tous ses membres. Il y a beaucoup de tensions parmi les cheikhs sur la ligne politique à adopter et le degré de progressisme acceptable. « Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi pousse pour réformer l’institution et le grand imam doit nécessairement être en phase avec les positions du chef de l’État », a fait savoir Baudoin Dupret. Et d’ajouter qu’une divergence de fond avec le président égyptien aboutirait à une crise et à la démission du cheikh d’Al-Azhar. Les autres cheikhs, eux ne doivent rien au chef de l’État, ce qui explique ces oppositions. En rappel, le 28 décembre 2014, le président égyptien avait appelé l’institution à révolutionner l’islam, en réaction à l’attentat du 24 novembre 2014 contre des fidèles en train de faire leur prière. Les principales critiques accusaient l’institution de n’avoir pas rejoint la guerre idéologique contre le terrorisme menée par le chef de l’État et de ne pas promouvoir un renouveau du discours religieux en Égypte. Mais si Al-Azhar souhaite donner l’image d’une institution plus progressiste, il n’en va pas de même pour ses discours concernant la politique étrangère. En effet, Al-Azhar avait condamné en août 2017 la décision du président tunisien autorisant le partage à parts égales de l’héritage entre homme et femme. Souvent, ces condamnations accompagnent une politique gouvernementale elle-même critique envers ce pays étranger. L’institution Al-Azhar sert alors de caisse de résonance de la politique du gouvernement, estime Baudoin Dupret.
Par Wakiyatou KOBRE